La succession de St Pierre

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MERCI DU FOND DU COEUR TRES SAINT PERE POUR VOTRE PONTIFICAT ET VOTRE ENSEIGNEMENT !

« On ne succède qu’à celui qui cède et quitte sa place, soit par déposition ou par la mort ; qui fait que Notre Seigneur est toujours Chef et Souverain Pontife de l’Eglise, et auquel personne ne succède, parce qu’il est toujours vivant, et n’a cédé ou quitté ce sacerdoce ou pontificat, quoi qu’il l’exerce en partie par ses ministres et serviteurs ici bas en l’Eglise militante : mais ces ministres et lieutenants peuvent céder et cèdent, soit par déposition, ou par la mort, leurs offices et dignités. »

Saint François de Sales, Les Controverses, Partie II, Ch. VI, article X, Des conditions pour succéder

Deuxième Dimanche de Carême : de l’oraison

Les homélies d’aujourd’hui, hormis leur grande pauvreté doctrinale, sont souvent confuses et désordonnées, à tel point qu’il est bien difficile d’en retenir quelque chose. Ce sermon de St François de Sales pour le deuxième dimanche de Carême nous montre la rigueur avec laquelle il construisait ses homélies et ses sermons :

« Nous ferons aujourd’hui quelques petites considérations par lesquelles nous montrerons qu’il y a quatre degrés en l’oraison ; mais avant tout cela, disons trois paroles. »

Enonçant ainsi son plan, il avive l’attention des auditeurs et permet à ceux-ci de se mettre dans de bonnes condition pour retenir quelque chose des points qui seront abordés. Remarquons également la référence permanente à l’Ecriture qui est à la source de son enseignement. Il s’agit dun enseignement concret et pratique au sujet de la prière et pas de vagues et fumeuses paroles moralisatrices.

Ce sermon permet donc de retenir facilement quelques idées fortes au sujet de l’oraison :

1/ Les marques physiques d’une bonne oraison

‘La première considération est celle-ci : Jésus étant monté sur la montagne se mit à prier, et étant en prière il fut transfiguré, et sa face devint plus reluisante que le soleil et ses vêtements blancs comme la neige’

« Si au sortir de l’oraison, vous avez un visage renfrogné et chagrin, l’on voit assez que vous n’avez pas fait l’oraison comme vous deviez. »

2/ Le risque du Mont Thabor et des consolations spirituelles.

« Ces trois Apôtres ayant vu la gloire de Notre Seigneur ne laissèrent par après de le quitter en sa Passion, et St Pierre qui avait parlé toujours plus hardiment, commit néanmoins un très grand péché en reniant son Maître. On descend de la montagne de Thabor pécheur, mais au contraire on descend de celle de Calvaire justifié ; cela s’entend quand on s’y tient ferme au pied de la Croix comme Notre Dame. » « L’on est véritablement fort en crainte parmi les consolations, car on ne sait si on aime les consolations de Dieu, ou bien le Dieu des consolations ; mais en l’affliction il n’ a y rien à craindre, pourvu qu’on soit fidèle. Voilà donc quant à la seconde considération. »

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Le Reniement de Saint Pierre

3/ L’oraison est pour tous et aide à bien faire son devoir d’état

« Je fais la troisième (considération) sur ce que l’on entendit la voix du Père éternel qui dit : Celui-ci est mon Fils bien aimé, écoutez-le. Il faut donc obéir au Père éternel en suivant Notre Seigneur pour ouïr sa parole. »

« Et voici que nous sommes enseignés que tous, de quelle condition qu’ils soient, doivent prier et faire oraison, car c’est là où principalement ce divin Maître nous parle. Je ne dis pas que nous devons faire autant d’oraison les uns que les autres, car il ne serait pas à propos que que ceux qui ont beaucoup d’affaires demeurassent aussi longuement en oraison que les Religieux. je dis bien néanmoins que si vous voulez bien faire votre devoir, il faut que vous priiez Dieu, et c’est en l’oraison que nous que nous apprenons à bien faire ce que nous faisons. »

4/ Ne voir plus que Dieu seul en toutes choses

« Les Apôtres étant relevés ne virent plus que Jésus seul. Ceci est le souverain degré de la perfection, ne voir plus que Notre Seigneur en quoi que nous fassions. »

Sermon pour le Deuxième Dimanche de Carême, 23 février 1614, Œuvres de  Saint Francois de Sales, Ed. de la Visitation, Tome IX, Sermons, vol III, p. 27-31

Premier Dimanche de Carême : De l’utilité des tentations pour la vie spirituelle

« Il faut regarder l’intention de la divine Majesté au temps de la tentation ; non pas que nous puissions penser ni dire que c’est Dieu qui nous tente ; oh non, car il ne le peut, mais il permet que nous soyons tentés et exercés. Et pourquoi, sinon pour nous gendarmer, fortifier et rendre vaillants et courageux en son service pour la conquête des vraies et solides vertus? C’est un abus de croire de les pouvoir acquérir et parvenir à la perfection sans être tenté des vices contraires. »

Sermon pour le premier dimanche de Carême 1614, Œuvres de  Saint Francois de Sales, Ed. de la Visitation, Tome IX, Sermons, vol III, p. 24-25

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Jérôme Bosch, Tentation de Saint Antoine

Léon Bloy et St François de Sales

Léon Bloy et St François de Sales

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Léon Bloy détestait St François de Sales. Il détestait aussi Ste Thérèse de Lisieux, ce qui n’est pas étonnant car elle est très proche de la spiritualité salésienne; nous y reviendrons dans de prochains posts.  Il le trouvait trop mièvre, trop prudent, trop ecclésiastique, en somme trop précieux. Et c’est effectivement ce qui caractérise le style littéraire de St François et qui peut représenter pour certains lecteurs contemporains une réelle difficulté et un empêchement pour la bonne compréhension de sa spiritualité :

«Miraculeusement édulcoré, l’ascétisme ancien s’assimila tous les sucres et tous les onguents pour se faire pardonner de ne pas être précisément la volupté, et devint, dans une religion de tolérance, cette chose plausible qu’on pourrait nommer le catinisme de la piété. Saint François de Sales apparut, en ces temps-là, juste au bon moment, pour tout enduire. De la tête aux pieds, l’Eglise fut collée de son miel, aromatisée de ses séraphiques pommades. La Société de Jésus, épuisée de ses trois ou quatre premiers grands hommes et ne donnant déjà plus qu’une vomitive resucée de ses apostoliques débuts, accueillit avec joie cette parfumerie théologique, où la gloire de Dieu, définitivement s’achalanda. Les bouquets spirituels de prince de Genève furent offerts par de caressantes mains sacerdotales aux explorateurs du Tendre, qui dilatèrent aussitôt leur géographie pour y faire entrer un aussi charmant catholicisme… Et l’héroïque Moyen Age fut enterré à dix mille pieds!….» Léon Bloy, Le Désespéré

Mais la vraie douceur, la douceur spirituelle ne vaut-elle pas mieux que les fulminations d’un prophète quand il s’agit de convertir? C’est la fameuse métaphore, reprise et souvent filée par SFS : on n’attrape pas des mouches avec du vinaigre. Il est vrai que certains caractères doivent d’abord être frappés par un discours « musclé ». Or, la première période de la vie de SFS est marquée par des prédications très fortes et très vigoureuses :

– je pense ici à son discours de réception comme prévôt de la cathédrale ayant pour sujet la reconquête spirituelle et politique de Genève. La ville était aux mains des réformés depuis déjà plusieurs décennies. Nous aurons l’occasion d’écrire un ou plusieurs posts au sujet de ce sermon très important pour le début de la carrière ecclésiastique de SFS.

– je pense aussi aux Controverses, oeuvre qui regroupe ses billets théologiques contre les Réformés lors de sa reconquête de Chablais

Si l’on se penche, même rapidement, sur la vie de St François de Sales, on ne peut être que frappé par la force qui s’en dégage et par l’extraordinaire activité qu’il développa dans toutes ses entreprises, loin de la soi-disant mièvrerie de son style littéraire. Il faut tenir l’un et l’autre, si l’on veut bien comprendre le personnage : l’écrivain qui répond aux canons littéraires de son temps et l’ouvrier de l’Evangile qui fit toujours preuve d’un courage admirable tout au long de sa vie :

– sa formation d’abord : à Padoue puis à Paris où il vécut une crise spirituelle d’une intensité qui faillit lui coûter la vie

– son retour dans sa patrie savoyarde où il est immédiatement chargée de la dangereuse mission en Chablais protestant où sa vie est potentiellement en danger

– sa rencontre avec Ste Jeanne de Chantal et la fondation de l’Ordre de la Visitation

– son activité politique et diplomatique

– son activité de prédicateur

– son oeuvre d’écrivain : les oeuvres complètes de la Visitation comptent 27 volumes! (livres, homélies, lettres, discours…)

C’est ce que lui-même a appelé dans le Traité de l’Amour de Dieu : l’extase de l’oeuvre. Cette extase, qui n’a rien de merveilleux extérieurement, est le sommet de la vie mystique :

« Ne point dérober, ne point mentir, ne point commettre de luxure, prier Dieu, ne point jurer en vain, aimer et honorer son père, ne point tuer, c’est vivre selon la raison naturelle de l’homme.

Mais quitter tous nos biens, aimer la pauvreté, l’appeler et tenir en qualité de très délicieuse maîtresse ; tenir les opprobres, mépris, abjections, persécutions, martyres, pour des félicités et béatitudes; se contenir dans les termes d’une absolue chasteté, et enfin vivre parmi le monde et en cette vie mortelle contre toutes les opinions et maximes du monde, et contre le courant du fleuve de cette vie par des ordinaires résignations, renoncements et abnégations de nous-mêmes, ce n’est pas vivre humainement, mais surhumainement; 

ce n’est pas vivre en nous, mais hors de nous et au-dessus de nous. Et parce que nul ne peut sortir en cette façon au-dessus de soi-même, si le Père éternel ne le tire (1), partant cette sorte de vie doit être un ravissement continuel et une extase perpétuelle d’action et d’opération. » Traité de l’Amour de Dieu, Livre VII, ch. VI

Trouvez-vous vraiment qu’il s’agit  d’un programme de vie éloigné de l’ascétisme ancien, édulcoré, sucré et mielleux? 

Un Maître pour aujourd’hui : la liberté spirituelle

La finalité de ce blog est de faire connaître un peu mieux la pensée de St François de Sales et de montrer son actualité pour aujourd’hui. Il ne s’agit donc pas de faire oeuvre de biographe ou d’exégète de sa pensée mais vraiment d’y puiser une règle de vie et d’action pour aujourd’hui.

St François ne renierait pas ces techniques modernes de communication. En fait, il en fut le lointain inventeur et promoteur. St François, dans son oeuvre de reconquête du Chablais  à la foi catholique,  se servit de petits billets théologiques qu’il allait distribuer lui-même chez les habitants en les glissant sous les portes. Un blog avant l’heure en somme! Je crois donc être fidèle à ce maître spirituel en m’attelant à la rédaction de ce blog.

L’actualité de l’Eglise est particulièrement mouvementée et la récente démission de Benoît XVI montre que l’Eglise est au coeur de l’histoire, au coeur d’un combat qui traverse les siècles, combat entre ceux qui cherchent à adhérer à la Rédemption du Christ et ceux qui cherchent à nous en détourner.

Au milieu de cette grande confusion des valeurs et des traditions, un homme comme l’évêque de Genève est d’un grand secours pour y voir clair.

St François de Sales vécut lui aussi dans une période historique de très grands changements et de défis pour l’Eglise. Il est le type même de l’Evêque voulu par le Concile de Trente mais, par sa dimension spirituelle, il dépasse de très loin ce conditionnement historique.

Il est un Maître et un Docteur pour aujourd’hui.

D’aucun ont été surpris par la démission de notre Pape Benoît. Comme si la souveraine liberté qu’il a ainsi montré était opposée à l’esprit chrétien. Il s’agit une fois de plus d’une idée reçue qui déforme le christianisme. «La Vérité vous rendra libre» nous dit St Jean. Poursuivant cette tradition, Saint François nous enseigne aussi cette souveraine liberté :

«Je vous laisse l’esprit de liberté, non pas celui qui forclôt (exclut) l’obéissance, car c’est la liberté de la chair ; mais celui qui forclôt la contrainte et le scrupule ou empressement.»

Et Saint François détaille les caractéristiques de la liberté chrétienne :

«La liberté de laquelle je parle, c’est la liberté des enfants bien aimés. Et qu’est-ce? C’est un désengagement du coeur chrétien de toutes choses pour suivre la volonté de Dieu reconnue.

Benoît XVI déclare agir en toute liberté après avoir reconnu la volonté de Dieu.

«Le coeur qui a cette liberté n’est point attaché aux consolations, mais reçoit les afflictions avec toute la douceur que la chair peut permettre.

Nul besoin d’insister sur les différentes afflictions et contrariétés reçues par Benoît XVI tout au long de ces huit ans de Pontificat. Nul besoin d’insister sur sa surnaturelle douceur et son humilité non feinte.

«(Ce coeur) n’engage nullement son affection aux exercices spirituels ; de façon que si par maladie ou autre accident, il en est empêché, il n’en conçoit nul regret. (…) Il ne perd guerre sa joie, parce que nulle privation ne rend triste celui qui n’avait son coeur attaché nulle part.» (Extraits de la Lettre à Ste Jeanne de Chantal, 14 oct. 1604)

A fortiori, un coeur chrétien vraiment libre n’engage pas son affection dans le pouvoir, même pontifical, même pétrinien! C’est ce que vient de démontrer de manière éclatante Benoît XVI.

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